« La crise humanitaire en République démocratique du Congo est sans égale. 6 millions de personnes aujourd’hui sont déplacées sans maison, sans nourriture. Ce sont quand même des êtres humains ! »
Des marches ont été organisées dimanche par les chrétiens en République démocratique du Congo pour protester contre les violences dans l’est du pays, où la rébellion du M23 continue de nier sa responsabilité, cinq jours après le massacre d’une centaine de civils dans le village de Kishishe, dont l’accuse Kinshasa.
Dans un communiqué de son président Bertrand Bisimwa, le mouvement rebelle reconnaît cependant que huit civils avaient été tués, par des « balles perdues » selon lui, durant les affrontements qui ont opposé ses combattants à des miliciens le 29 novembre dans ce village du territoire de Rutshuru.
Le M23 est une ancienne rébellion tutsi qui a repris les armes fin 2021 et bénéficie, selon Kinshasa, du soutien actif du Rwanda, ce que conteste Kigali.
Un sommet organisé le 23 novembre en Angola a ordonné un cessez-le-feu suivi du retrait des rebelles des positions conquises ces derniers mois, faute de quoi une force régionale est-africaine en cours de déploiement dans l’est de la RDC les délogerait. Aucun retrait n’a été observé à ce jour.
Une quinzaine de cortèges partis dimanche des paroisses congolaises à l’appel de l’Eglise catholique pour protester contre « l’agression » de leur pays. Les manifestants scandaient leurs slogans « Non à la balkanisation de la RDC », « Non à l’hypocrisie de la communauté internationale... », accompagnés de chants religieux.
Un calme relatif était observé dimanche sur les différents fronts, mais plusieurs sources faisaient état d’un renforcement des positions en certains endroits, notamment du M23 vers Kishishe.
Interviewé par Vatican News lors de son passage à Rome, Denis Mukwege, le gynécologue et militant des droits de l’homme, prix Nobel de la Paix 2018, affirme, « je crois qu’effectivement l’Église doit jouer son rôle ».
« Je crois qu’effectivement l’Église doit jouer son rôle. Mais c’est moins un problème de réconciliation entre les Congolais... C’est un problème qui a commencé après le génocide du Rwanda, en 1996 et après ce problèmes continue aujourd’hui, plus de 25 ans après, les Congolais continuent à payer une crise régionale qui n’était pas née au Congo, mais qui aujourd’hui fait beaucoup plus de dégâts au Congo que dans le pays où le génocide s’était passé. »
Il demande à la communauté internationale « d’appliquer le droit international humanitaire qui demande à tous les États membres de Nation unies de pouvoir respecter la souveraineté, l’intégrité territoriale des autres Etats », et réclame « des résolutions qui interdisent aux Etats ou aux institutions de fournir les armes aux rebelles dans la région des Grands Lacs ».
Lui demande des sanctions, et trouve scandaleux « que des pays qui sont à l’origine de cette agression sont soutenus, reçoivent de l’argent de l’Union européenne ».
« Et cela c’est scandaleux, de voir des pays qui agressent le nôtre et qui ont le soutien de l’Union Européenne. Nous demandons que cette complicité puisse s’arrêter. »
« La souffrance a trop duré », alerte-t-il.
« La crise humanitaire en République démocratique du Congo est sans égale. 6 millions de personnes aujourd’hui sont déplacées sans maison, sans nourriture. Ce sont quand même des êtres humains ! Ceux qui sont responsables et qui reçoivent en plus des aides, je trouve que c’est blesser tous ces Congolais qui sont dans la boue aujourd’hui sous la pluie, sans nourriture. Beaucoup d’enfants vont mourir, et ce que nous demandons c’est des sanctions plutôt contre ce pays au lieu de continuer à l’aider financièrement. »
M.C. (avec AFP)